La musique électronique: Premier modèle de la fusion homme/machine ?

Dans un de mes commentaires sur epsychologie, j’évoquais le fait que nous nous ne sommes pas suffisamment intéressé au coté précurseur de la musique électronique dans les réflexions psychanalytiques sur les cybermondes, les mondes numériques et donc la cybernétique.

Dans un article intitulé vers une intélligence cyborg paru dans le n°190 de Sciences Humaines, Stéphane Desbrosses évoque une expérience de Kevin Warwick qui consistait par l’implant d’une puce dans le système nerveux à envoyer un signal vers une machine en bougeant la main et de plus la machine pouvait par un signal retour faire bouger le bras de K. Warwick. Plus tard par ce système il a pu manipuler un bras robotisé suffisamment finement pour manipuler un œuf. D’autres expériences hallucinantes sont évoquées dans l’article cité plus haut que je vous invite à lire.

Ainsi, un nouveau rapport avec la technologie s’ouvre à nous. De là à ce que de plus en plus de pièces électroniques s’intègrent à notre corps, il n’y a qu’un pas, qui certes ne manquera pas de rencontrer certaines résistances ;).

Dès lors qu’on voit là les prémices d’un rapprochement avec la machine, ce n’est plus de la Science Fiction. Mais voilà, je fais l’hypothèse que ce premier pas s’est déjà produit au tournant allant des années 60 (premiers synthétiseurs) jusqu’à la fin des années 70 avec l’explosion de la musique électronique. C’est dans les années 70 qu’arrive le travail en temps réel. C’est dans ce contexte que le groupe Kraftwerk (”centrale électrique”) développe une maitrise de la machine touchant à la virtuosité : continuant le principe de détourner et modifier des machines existantes pour produire et générer du son, ils franchirent un pas important avec le vocoder (transformation d’une voix humaine en voix syntétique). Ce groupe qui a eu une influence énorme et en a inspiré beaucoup, montait sur scène déguisé en robot et chantait : “we are the robot” avec cette voix robotisée propre au vocoder. Quelque soit le coté artificiel qu’on pouvait leur reprocher, les mélodies fonctionnaient. Et même très bien, vu le succès qu’ils ont eu.

Nous connaissons depuis longtemps en psychanalyse l’importance du sonore et par extension de la musique dans le développement des premiers temps de la vie et même avant. Le nourrisson est d’emblée baigné dans un environnement sonore. Déjà dans le ventre maternel, le futur petit d’homme entend des sons, des voix et en premier la voix de sa mère. Et surtout n’oublions pas que le signifiant est avant tout oral. Le signifiant est irréductiblement et tout d’abord une empreinte acoustique.

Ainsi, il est aisée de se rendre compte de l’importance du sonore et notamment la voix. Il n’est pas sans intérêt de noter comment on identifie les personnes à leurs voix. On se rappelle souvent des mots de nos proches avec leur voix. Et bien que ça ne soit pas la seule composante de l’identification, elle en demeure une partie essentielle : qui n’a pas eu déjà l’impression de ne pas s’adresser à la même personne lorsque dans le cas d’une rencontre sur internet, on entend sa voix pour la première fois ?

Imaginez alors ce que peut signifier sur le plan identitaire, certes dans le jeu du déguisement, de transformer sa voix en celle d’un robot ? Cette façon d’humaniser la machine est de part la dialectique du stade du miroir, si brillamment analysé par Lacan (voir l’autre en soi/se voir dans l’autre), ce premier pas franchi pour se voir dans la machine et voir la machine en soi.

De plus, parce que la musique en tant que sonore renvoie à nos premiers temps de vies et parce que le premier son important est la voix de la mère indissociable de son regard (en même temps cette voix porte son regard tout en l’ayant précédé dans la vie intra-utérine), la musique électronique place la machine au niveau du maternel.

Prenez cet article très simplement avec Annonce-ton-buzz.com

Tags:,

Articles relatifs